Déclaration des hauts responsables du Mécanisme à l'occasion de la Journée de la justice pénale internationale
Aujourd’hui, les hauts responsables du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux (le « Mécanisme »), le Président Carmel Agius, le Procureur Serge Brammertz et le Greffier Abubacarr Tambadou, ont publié la déclaration suivante à l’occasion de la Journée de la justice pénale internationale :
« La Journée de la justice pénale internationale nous rappelle chaque année la responsabilité que nous partageons de soutenir la justice pénale internationale sous toutes ses formes et dans toutes ses instances, l’engagement que nous avons pris de lutter contre l’impunité pour les crimes atroces perpétrés partout dans le monde et la mission dont nous sommes investis de traduire en justice les auteurs de ces crimes.
Il y a 25 ans, le premier témoin entrait dans la salle d’audience du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (le « TPIY ») pour témoigner dans l’affaire Tadić. Il est donc opportun de revenir sur le chemin parcouru par ceux qui ont survécu à ces atrocités et trouvé la force de s’exprimer et de témoigner contre les auteurs de ces crimes. La justice pénale internationale repose en très grande partie sur leur courage.
Depuis cette audience fondatrice il y a un quart de siècle, le TPIY, le Tribunal pénal international pour le Rwanda (le « TPIR ») et le Mécanisme ont, à eux trois, fourni à quelque 7 000 témoins un lieu sûr pour livrer leurs récits. C’est l’expérience directe des victimes et des témoins qui remplit les pages des jugements et des arrêts. Sans la volonté des victimes de se faire connaître, le siège des accusés serait resté vide. Sans leur témoignage, la justice internationale serait restée muette.
On ne saurait surestimer le supplice enduré par les victimes de crimes internationaux. Ce sont quelques-unes des inimaginables souffrances qu’ils ont subies qui sont largement décrites dans les milliers de pages des comptes rendus d’audiences et des jugements et arrêts. Comme la Chambre de première instance II l’a déclaré dans l’affaire Nyiramasuhuko et consorts portée devant le TPIR : « [d]es pires qu’elle ait entendus, les récits de rescapés […] brossent un tableau criant de sauvagerie et de sadisme inqualifiables ».
La Journée de la justice pénale internationale rend hommage à ce que les victimes ont réussi à accomplir, et vient nous rappeler de manière glaçante ce qu’elles ont dû subir. Leurs témoignages ont permis aux juges de rendre des jugements et arrêts équitables, ont fait connaître la vérité au grand public et ont aidé à favoriser la réconciliation. Cette journée nous rappelle également le rôle que nous jouons pour rendre aux victimes et à leurs familles la justice qu’ils méritent, dans l’espoir d’atténuer leurs souffrances et de les aider à trouver un certain apaisement.
À cet égard, aujourd’hui, nous sommes unis contre le négationnisme et le révisionnisme, contre les tentatives inacceptables d’effacer de l’histoire les horreurs vécues par les victimes ou de réécrire la cause de leur traumatisme. Les tribunaux ad hoc et le Mécanisme ont rendu plus de 160 jugements et arrêts, qui constituent un rempart contre les vagues de négationnisme. L’effet de ces jugements et arrêts est renforcé par la mise en œuvre de mesures vigoureuses et des dizaines de poursuites pour outrage engagées contre ceux qui tentent d’influencer les témoins en vue de remettre en cause les faits établis.
Enfin, la Journée de la justice pénale internationale porte un message d’espoir, à savoir que les efforts que nous déployons à travers le monde pour défendre l’état de droit ne serviront pas seulement à dissuader les auteurs de ces crimes et à empêcher que de nouveaux crimes internationaux ne soient perpétrés, mais qu’ils renforceront le respect des principes fondamentaux de l’humanité. En ce jour, de même que chaque jour, unissons-nous pour œuvrer en faveur de cet idéal et soutenons les victimes dans leur quête de justice. »